Prévention : les réponses à vos questions

Date de dernière mise à jour : 29/05/2015

De nombreuses questions et idées reçues circulent à propos de la prévention du cancer. Certaines interrogations constituent des sujets de vigilance, sur lesquels les chercheurs en prévention travaillent ; d'autres proviennent d'incompréhensions ou se sont révélées erronées.

A ce jour, il n'est pas possible de maîtriser les risques de survenue de tous les cancers. D'abord, parce qu'on ne peut pas agir sur tous les facteurs susceptibles d'intervenir, notamment les facteurs d'ordre génétique et certaines causes environnementales. Ensuite, parce qu'on ne connaît pas encore toutes les causes susceptibles de favoriser le développement de cancers. C'est pourquoi de nombreuses études sont en cours pour déterminer l'impact de facteurs dont on suspecte qu'ils jouent un rôle et en identifier d'autres.

Les réponses que vous trouverez ici ont été élaborées en l'état actuel des connaissances. Elles ont été classées par ordre alphabétique.

Par ailleurs, bien qu'Internet puisse constituer une source d'information très riche, rien ne saurait remplacer une consultation avec votre médecin traitant ou tout autre professionnel de santé.


Cancers et perception des risques : interview de Thierry Philip, directeur du département Cancer et environnement, économie de la santé, Centre Léon Bérard (Lyon).


  • L'aspartame est-il cancérigène ?

    A ce jour, l'aspartame n'est pas considéré comme cancérigène.

    La sécurité de ce produit est régulièrement remise en question. En 2013, l'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA), après évaluation complète des risques associés à l'aspartame, conclut que l'aspartame est sûr aux doses autorisées pour la consommation humaine. Une évaluation est également en cours auprès de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES).

  • Des études suggèrent que l'aspirine pourrait prévenir certains cancers, notamment du côlon-rectum, mais aussi ralentir leur évolution et réduire le risque de développer des métastases. Toutefois, ce médicament n'est pas sans risque : ses effets secondaires, notamment le risque d'hémorragie digestive, limitent fortement son emploi. C'est pourquoi il n'est pas possible d'utiliser l'aspirine comme un médicament préventif pour tout le monde. Les recherches se poursuivent pour déterminer précisément quelles personnes pourraient vraiment en bénéficier.

  • L'expression « anticancer », largement utilisée dans les médias et dans certains ouvrages, peut laisser croire que la consommation d'un aliment en particulier peut empêcher le développement d'un cancer, voire le guérir, ce qui est totalement faux et infondé, voire dangereux. Elle fait souvent référence à une étude scientifique qui, dans la plupart des cas, observe un effet d'un facteur alimentaire dans un modèle d'expérimentation non directement extrapolable à l'homme (cellules en culture, modèles animaux). Il est important de ne pas se focaliser sur un aliment donné mais plutôt de privilégier une alimentation diversifiée et équilibrée.

  • Le cannabis (également connu sous le nom de haschich ou de marijuana) est une plante. Son principe actif est le tétrahydrocannabinol (THC), qui ne semble pas être un agent cancérigène. En France, le cannabis est consommé sous forme de joint la plupart du temps. Il existe donc, comme pour tous les produits fumés avec combustion, un dégagement de substances cancérigènes qui contaminent les cellules pulmonaires profondes par voie aérienne ; ces lésions peuvent évoluer en cancer du poumon. Par ailleurs, si le joint est consommé avec un filtre en carton, la fumée qu'il produit contient autant de monoxyde de carbone et de goudrons que trois à six cigarettes manufacturées.

  • Le risque pour les enfants vivant autour de centrales nucléaires de souffrir d'une leucémie donne lieu à beaucoup de débats. En France, une étude (GEOCAP) a observé le nombre de cas de leucémies chez les enfants vivant dans une zone de 5 km autour des centrales nucléaires françaises sur la période 2002-2007. Les résultats montraient un excès de leucémies par rapport au nombre théorique attendu mais cet excès est difficile à interpréter. Il n'était pas lié à une centrale particulière, ni spécifique d'une classe d'âge, et n'apparaissait plus lorsque l'ensemble des données disponibles en France étaient considérées sur la période 1990-2007. Les études se poursuivent, notamment avec la mise en place d'une structure européenne de recherche appelée MELODI (Multidisciplinary European LOw Dose Initiative). Elle regroupe plus d'une quinzaine d'organismes européens spécialisés en radioprotection ou impliqués dans les études liées aux faibles doses de radioactivité.

  • Il a été démontré que la consommation de compléments alimentaires contenant du bêta-carotène à forte dose (égal ou supérieur à 20 mg/j) augmente le risque de cancer du poumon chez les fumeurs et chez les sujets exposés à l'amiante. Pour d'autres types de compléments alimentaires, la balance bénéfices/risques est incertaine. Ainsi, sauf cas particuliers de déficit et sous contrôle d'un médecin, la consommation de compléments alimentaires n'est pas recommandée. Il est conseillé d'équilibrer et de diversifier son alimentation sans recourir à des compléments alimentaires.

  • On ne développe pas un cancer en côtoyant une personne qui en souffre. En revanche, certains cancers ont une origine infectieuse. Ainsi, les papillomavirus humains (HPV) sont susceptibles de provoquer des cancers du col de l'utérus et les virus des hépatites B et C (VHB et VHC) peuvent être à l'origine de cancers du foie. Ces virus ne provoquent pas directement un cancer mais entraînent une infection chronique qui en favorise l'apparition. En évitant d'être contaminé, vous réduisez fortement ces risques. On dispose de vaccins pour prévenir les infections causées par les HPV et le VHB.

    Vis-à-vis de l'infection à HPV, il est également recommandé à toutes les femmes de 25 à 65 ans, qu'elles soient vaccinées contre les HPV ou non, de faire un test de dépistage du cancer du col de l'utérus tous les trois ans après deux premiers frottis annuels normaux.

    La prévention des hépatites B et C passe par l'utilisation des procédures (précautions dites « standard ») et des matériels de sécurité lors des soins et, pour les usagers de drogues, par les traitements de substitution et les outils de réduction des risques. S'y ajoute l'utilisation du préservatif pour prévenir la transmission par voie sexuelle.

  • Certains modes de cuisson mettant en jeu des températures supérieures à 200°C ou exposant directement les aliments aux flammes (fritures, grillades, barbecue...) peuvent entraîner la formation de substances potentiellement cancérigènes, mais les données scientifiques disponibles sont limitées pour conclure à une relation avec le risque de cancers. Il est ainsi plus prudent de ne pas consommer fréquemment ou en grande quantité des aliments brûlés/calcinés. Toutefois, dans des conditions correctes d'utilisation, ces modes de cuisson n'ont pas d'impact sur le risque de cancers. Par ailleurs, aucun lien entre consommation d'aliments préparés au four à micro-ondes et risque de cancer n'a été identifié. En revanche, le réchauffage en four à micro-ondes ou en cuit-vapeur d'aliments placés dans des contenants alimentaires en plastique susceptibles de contenir du bisphénol A (BPA) est déconseillé, afin de réduire l'exposition de la population à cette substance, notamment les nourrissons, les jeunes enfants et les femmes enceintes ou allaitantes. En effet, l'exposition au BPA in utero pourrait favoriser, ultérieurement; des cancers chez les enfants.

  • L'exposition aux champs magnétiques à extrêmement basse fréquence, qui sont émis tout près des lignes à haute tension, sont classés par le CIRC (centre international de recherche sur le cancer) comme peut-être cancérigènes pour l'Homme (groupe 2B). Une vaste étude nationale (GEOCAP) a été menée auprès des populations vivant notamment à proximité de lignes haute tension. Les chercheurs ont observé une augmentation du risque de leucémie chez l'enfant de moins de 5 ans pour des habitations situées à moins de 50 m d'une ligne très haute tension (225 - 400 kV). Toutefois, peu d'enfants vivent aussi près de lignes haute tension (environ 2 pour 1 000, selon l'étude GEOCAP).

  • Fin octobre 2018, une étude française, NutriNet-Santé, mettait en avant une association significative entre forte consommation d’aliments issus de l’agriculture biologique et diminution du risque de cancers (tous types de cancers confondus). Cependant, les preuves ne sont pas encore suffisantes pour parler de lien de causalité : l’association entre alimentation biologique et risque de cancers doit être confirmée par d’autres recherches. Par ailleurs, aucune étude rigoureuse ne permet d'avancer que les fruits et légumes issus de procédés de production classiques augmenteraient le risque de cancer. Il importe avant tout de consommer tous les jours, au moins 5 portions de fruits et légumes (soit l'équivalent de 400 grammes par jour), quel que soit leur mode de production.

  • Les organismes génétiquement modifiés (OGM) sont définis comme des organismes (animaux, végétaux) ou des micro-organismes dont le matériel génétique (l'ADN) a été transformé par l'homme.

    Cette transformation peut-elle induire des effets toxiques à long terme, voire des cancers chez les consommateurs ? Pour répondre à cette question, la communauté scientifique étudie la toxicité éventuelle des OGM depuis de nombreuses années, sans que des effets soient démontrés. Cependant, les OGM font l'objet d'un cadre réglementaire européen. Chaque demande d'autorisation de mise sur le marché est analysée : elle doit être accompagnée d'éléments scientifiques permettant de caractériser le produit et de prouver qu'il est conforme aux exigences. En France, l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) se charge d'examiner des analyses scientifiques indépendantes, argumentées et actualisées sur chaque OGM qui lui est soumis.

  • Les perturbateurs endocriniens (PE) sont des substances chimiques d'origine naturelle ou artificielle qui peuvent imiter certaines hormones et donc interférer avec le fonctionnement de notre système hormonal. Le bisphénol A, les dioxines, les phtalates et le chlordécone sont les plus connus.

    Les effets sur la santé humaine de l'exposition à de faibles doses de PE sont sujets à controverse car les liens de cause à effet avec certains cancers sont difficiles à établir. En effet, nous sommes tous exposés à de faibles doses de plusieurs PE, d'une manière plus ou moins chronique, et il est difficile d'évaluer le rôle de chaque substance.

    On suspecte toutefois certains PE d'être à l'origine de certains cancers dits hormono-dépendants (dépendant de l'activité d'une hormone) : cancers thyroïdiens, du sein, de l'ovaire, de la prostate et du testicule. Le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) a récemment classé le diéthylstilbestrol (Distilbène), le benzopyrène, la dioxine dite Sévéso et les PCB comme étant cancérigènes pour l'Homme.

    Le 29 avril 2014, le ministère de l'Ecologie et du Développement durable a présenté une Stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens, qui a pour objectif de réduire l'exposition humaine et environnementale à ces substances.

  • Il est question ici des pesticides contenus dans l'alimentation et non des expositions professionnelles, environnementales ou domestiques (risque associé à l'inhalation ou au contact de pesticides). La teneur des aliments en résidus de pesticides fait l'objet d'une réglementation stricte et de contrôles réguliers. Ainsi des seuils réglementaires, dits limites maximales de résidus (LMR), sont fixés pour garantir la santé des consommateurs. Les études démontrant l'effet protecteur des fruits et légumes vis-à-vis des cancers sont menées sur les consommations réelles, c'est-à-dire avec la présence éventuelle de résidus de pesticides sur les végétaux. Pour limiter davantage l'ingestion de pesticides résiduels, il est conseillé de laver les fruits et légumes et de peler ceux qui s'y prêtent. C’est dans un contexte d’exposition intense aux pesticides (exposition professionnelle notamment) que le risque a été identifié.

  • Les radiofréquences ne représentent qu'une partie des champs électromagnétiques observés couramment dans notre quotidien, qu'ils soient d'origine naturelle ou produits par les activités humaines. Elles sont notamment utilisées par la téléphonie mobile et les téléphones sans fil (DECT), la radio, la télévision, les antennes relais, le réseau wifi, les liaisons sans fil Bluetooth et les radars. Aucune preuve scientifique ne montre aujourd'hui que l'exposition à ces ondes présente un risque pour la santé. Néanmoins, leurs éventuels effets sanitaires suscitent de nombreuses interrogations, et un intérêt particulier est porté par les pouvoirs publics à une meilleure connaissance de ces effets chez les enfants, ainsi qu'à la question de l'hypersensibilité aux champs électromagnétiques.

  • Certains produits cosmétiques, comme des déodorants, des dentifrices ou des rouges à lèvres contiennent des sels d'aluminium.

    Ceux contenus dans les anti-transpirants ont été suspectés de favoriser le développement de cancers du sein. Or les dernières évaluations scientifiques ont conclu que les déodorants ne présentaient pas de danger pour la santé dans les concentrations actuellement sur le marché. En mars 2020, le comité scientifique pour la sécurité des consommateurs de l’Union européenne considère « comme sûre l’utilisation de l’aluminium dans les anti-transpirants, les dentifrices et les rouges à lèvres dans les concentrations usuelles des formules commercialisées » (soit moins de 10,60 % pour les sprays et 6,25 % pour les autres, des seuils supérieurs à ceux retrouvés dans les produits sur le marché).

    Même une application quotidienne de produits contenant du sel d’aluminium ne constitue pas un ajout significatif par rapport à l’aluminium absorbé en provenance d’autres sources.

    En 2011, l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) avait conclu que « sur la base des données actuelles disponibles, l'exposition à l'aluminium par voie cutanée ne peut pas être considérée comme présentant un risque cancérigène ».

  • A ce jour, il n'y a pas de preuve scientifique d'un lien de cause à effet entre stress et cancer. En effet, il n'a jamais été démontré qu'un choc psychologique lié à un événement de vie stressant (un divorce, le décès d'un proche, un licenciement...) pouvait provoquer un cancer. De nombreuses études scientifiques ont exploré cette hypothèse, couramment répandue, mais elles n'ont pas permis de conclure à un rôle direct de facteurs psychologiques dans l'apparition d'un cancer.

  • Les téléphones mobiles utilisent une classe d'ondes électromagnétiques particulière, dite « radiofréquence ». Ces appareils, que l'on tient généralement près de nous durant toute la journée, constituent de ce fait la source d'exposition la plus importante à ce type d'ondes. En mai 2011, le CIRC a classé les « champs électromagnétiques de radiofréquences, y compris ceux émis par les téléphones portables et sans fil », comme « peut-être cancérogènes pour l'homme » (2B).

    Les autorités sanitaires recommandent, par précaution, de limiter votre exposition aux radiofréquences émises par les téléphones portables, grâce à quelques actions simples :

    • éloigner le téléphone mobile de votre tête en utilisant un kit mains libres (oreillettes) ;
    • éviter de téléphoner dans les zones de mauvaise réception (intérieur d'un véhicule ou d'un ascenseur, dans le métro, en parking souterrain...) car, pour maintenir la qualité de transmission, le téléphone portable augmente automatiquement sa puissance d'émission et donc, votre niveau d'exposition aux ondes électromagnétiques ;
    • éviter les conversations trop longues : une communication prolongée augmente la durée de votre exposition aux radiofréquences ;
    • éviter de téléphoner lors de déplacements à grand vitesse : le téléphone mobile entre successivement en relation avec différentes stations de base, or à chaque fois qu'il doit rechercher un nouveau relais, il élève sa puissance d'émission au niveau maximal ;
    • conseiller à vos enfants de ne pas utiliser sans arrêt leur téléphone portable : si des effets sanitaires étaient un jour mis en évidence, les jeunes pourraient y être plus sensibles que les adultes. Par ailleurs, parvenus à l'âge adulte, ils auront été exposés plus longtemps aux champs électromagnétiques émis par ces téléphones.