Médecine de précision : exemples d’avancées pour les patients

Depuis une quinzaine d’années, la médecine de précision ne fait plus seulement partie de la recherche mais bien des soins disponibles pour traiter les cancers. Certains patients bénéficient d’ores et déjà de ces traitements, notamment pour les leucémies myéloïdes chroniques, certains cancers du sein ou encore les mélanomes avancés.

La leucémie myéloïde chronique

La leucémie myéloïde chronique (LMC) fait partie des maladies du sang. Elle est associée, dans 95% des cas, à une anomalie moléculaire particulière, la translocation BCR-ABL. Cette anomalie aboutit à la création d’un chromosome anormal, appelé chromosome Philadelphie, sur lequel se trouve le gène BCR-ABL. Ce gène, présent uniquement dans les cellules de la maladie, entraîne la production d’une protéine appelée protéine de fusion BRC-ABL. Cette protéine est responsable de la prolifération des cellules anormales.

Translocation BCR-ABL
Translocation BCR-ABL

L’imatinib est un traitement qui cible directement la protéine de fusion BCR‐ABL. Il a conduit à de très grands progrès dans la prise en charge de la LMC depuis le début des années 2000 et constitue aujourd’hui le traitement standard des patients porteurs de cette anomalie. Des études cliniques ont montré que 88% des patients étaient encore en vie 6 ans après le début du traitement. Depuis 2010, d’autres molécules ont reçu une autorisation de mise sur le marché pour cette maladie : le dasatinib, le nilotinib, le bosutinib et le ponatinib.

Le cancer du sein « HER2 positif »

Environ 15-20 % des cancers du sein s’accompagnent d’une surexpression de HER2 qui est associée à un pronostic plus défavorable. On parle de cancer du sein « HER2 positif ». Cette surexpression du gène HER2, qui se traduit par une augmentation du nombre de récepteurs HER2, favorise la croissance et la prolifération des cellules cancéreuses.

HER2 positif
HER2 positif

Le trastuzumab est un traitement qui agit en bloquant les récepteurs HER2 pour entraver la division et le développement des cellules cancéreuses. Il est indiqué, depuis 2000, dans les cancers du sein HER2 positifs. Après avoir largement fait progresser la prise en charge des cancers métastatiques, il a été montré que ce traitement améliore également la survie des patientes avec un cancer de stade précoce.

Du nouveau dans la prise en charge du mélanome métastatique

Le mélanome représente une minorité des cancers de la peau, mais c’est le plus grave d’entre eux et le nombre de nouveaux cas augmente chaque année. Il y a encore peu de temps, le pronostic pour les patients au stade métastatique était très sombre, et ce, malgré les traitements existants. Toutefois, l’arrivée de nouveaux médicaments ces dernières années a relancé les espoirs dans la prise en charge de ce cancer.

Thérapies ciblées en association

Près d’un mélanome sur deux est associé à une mutation du gène BRAF. Cette mutation entraîne la production d’une protéine anormale qui contribue au développement des cellules tumorales. L'identification de cette anomalie a conduit au développement de thérapies ciblant les tumeurs porteuses de cette mutation. Ainsi en 2012, le premier traitement anti-BRAF a été autorisé (vémurafénib) pour les patients dont la tumeur porte cette anomalie moléculaire, suivi en 2013 par une autre molécule (dabrafénib). Les réponses observées avec ces traitements, utilisés initialement en monothérapie, ont été très encourageantes. Cependant, malgré la présence de la mutation du gène BRAF, un bénéfice n’est observé que chez un patient sur deux. En outre, chez les patients répondeurs et traités par un anti-BRAF en monothérapie, une résistance apparait quasi systématiquement et de façon rapide, rendant alors le traitement inefficace.

Dans un second temps, d’autres traitements ont été développés pour mieux bloquer la prolifération des cellules tumorales chez ces patients (notamment des traitements appelés « inhibiteurs de MEK »). L’utilisation d’un inhibiteur de BRAF en association avec un inhibiteur de MEK (tramétinib ou cobimetinib) a ainsi permis d’améliorer le problème de résistance acquise précocement et la durée de vie des patients a été prolongée significativement. L’association dabrafénib-tramétinib a ainsi obtenu une autorisation de mise sur le marché (AMM) en septembre 2015 chez les patients présentant cette mutation du gène BRAF dans leur tumeur.

Immunothérapies spécifiques

L’ipilimumab (un anti-CTLA-4) est la première immunothérapie à avoir été autorisée en 2011 dans le mélanome avancé. Elle agit sur les cellules immunitaires qui, une fois activées, pourront combattre les cellules tumorales.

Chez certains patients (15-20%), ce traitement a été associé à une réponse longue, parfois de plusieurs années, soulevant même la question d’une éventuelle guérison. Les résultats très encourageants de cette première immunothérapie ont entraîné un fort engouement de la communauté scientifique et ont ouvert la voie à d’autres traitements. Ainsi, deux nouveaux médicaments (des anti-PD1) sont autorisés depuis l’été 2015 : le pembrolizumab et le nivolumab, ce dernier pouvant, en outre, être prescrit pour traiter certaines formes de cancers du poumon et du rein.

Cependant, ces nouveaux médicaments, prescrits en monothérapie, ne sont efficaces que chez certains patients mais tous sont exposés à leurs effets indésirables qui peuvent être sévères. Pour améliorer les chances de réponse, la recherche se tourne désormais vers des associations entre plusieurs immunothérapies ou avec des thérapies ciblées.