Les pesticides
Date de dernière mise à jour : 20/06/2014
Les pesticides ont été largement utilisés à partir de la seconde moitié du vingtième siècle, en particulier par l'agriculture intensive. La question de leurs effets sur la santé suscitant des inquiétudes, plusieurs actions sont menées en vue de réduire l'exposition de la population aux pesticides et de mieux connaître leurs effets.
Les pesticides, qu'est-ce que c'est ?
Le terme « pesticides » désigne principalement les substances ou les préparations utilisées pour la prévention, le contrôle ou l'élimination d'organismes (plantes, animaux, champignons ou bactéries) jugés indésirables car provoquant des dommages aux denrées alimentaires, aux produits agricoles, au bois ou aux aliments pour animaux.
Ce terme générique désigne les produits à usage agricole (produits phytopharmaceutiques : insecticides, fongicides, herbicides), les biocides et les antiparasitaires à usage vétérinaire ou humain.
L'usage des pesticides a entraîné la présence de résidus dans l'environnement, notamment dans l'eau des rivières et des nappes phréatiques, dans l'air et dans les eaux de pluie. Les pesticides se retrouvent également dans les aliments tels que les fruits, les légumes, les céréales et les produits d'origine animale (œufs, lait, viande, poisson...), sous forme de résidus.
Le terme « résidus » désigne les produits de dégradation des pesticides présents dans les différents milieux, dont certains sont issus de molécules aujourd'hui interdites, quelquefois depuis de nombreuses années mais qui, du fait de leur persistance dans l'environnement (eau, sol), peuvent conduire à une exposition des populations.
Sources et voies d'exposition
L'exposition aux pesticides peut se produire dans un cadre professionnel, lors de la fabrication ou de l'utilisation de ces produits, ou concerner l'ensemble de la population lors des usages domestiques, le contact avec des milieux contaminés (sol, air extérieur et intérieur, poussières, surfaces, etc.) ou la consommation d'eau ou de denrées alimentaires contenant des résidus. Cette exposition peut ainsi être liée à l'alimentation, à des activités domestiques, à la proximité de zones agricoles ou urbaines traitées ou à la rémanence de contaminations passées. Elle peut se faire par voies respiratoire ou cutanée, ou par ingestion.
En milieu professionnel, les sources potentielles de contamination sont nombreuses. Toutefois, les activités agricoles représentent les principales sources d'exposition.
Pesticides et cancers
Les professionnels utilisant des pesticides dans le cadre de leur activité y sont les plus exposés mais la population générale est également concernée, à des niveaux variables. Les conséquences de cette exposition sont souvent difficiles à apprécier car les effets des faibles doses, des mélanges ou des expositions de longue durée sont mal connus.
Toutefois, des études indiquent la possibilité d'un lien entre l'utilisation prolongée de pesticides et un sur-risque de cancer chez les adultes et les enfants.
Le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) a évalué et classé une soixantaine de pesticides dont on estime qu'ils sont cancérigènes pour l'homme. Seuls les insecticides arsenicaux sont considérés comme certainement cancérigènes. Trois autres familles de pesticides entrent dans la catégorie des cancérigènes probables et 19 dans celle des cancérigènes possibles.
Récemment, il a classé cinq pesticides comme probablement cancérigènes : le malathion (utilisé aux Antilles pour la prévention du chikungunya), le glyphosate (principe actif du "Round Up" de Monsanto), le parathion, le diazinon et le tetrachlorvinphos.
En juin 2013, l'Inserm a publié une expertise collective sur les pesticides et leurs effets sur la santé. Elle conclut à de « fortes présomptions » concernant l'association entre l'exposition professionnelle aux pesticides et le risque de survenue du lymphome non hodgkinien, du myélome multiple et du cancer de la prostate chez l'adulte.
En revanche, il n'a pas été démontré, pour le moment, que les traces de pesticides retrouvées dans notre alimentation pouvaient entraîner des maladies. A l'inverse, les études montrent que les gros consommateurs de fruits et légumes sont les mieux protégés contre les maladies cardio-vasculaires et les cancers.
Or, les études démontrant cet effet protecteur sont menées sur les consommations réelles, c'est-à-dire avec la présence éventuelle de résidus de pesticides sur les végétaux. Pour en limiter davantage l'ingestion, il est conseillé de laver les fruits et légumes et de peler ceux qui s'y prêtent.
Agir contre les pesticides
Les pouvoirs publics ont pris de nombreuses mesures pour réduire la présence des pesticides :
- taxation des produits antiparasitaires à usage agricole et des produits assimilés via la « taxe générale sur les activités polluantes » (TGAP), qui s'applique aussi aux semences traitées. Cette taxe finance notamment des actions prévues dans le cadre du plan Ecophyto 2018 ;
- interdiction de toute publicité pour des pesticides à destination du public, sur quelque support que ce soit, depuis juillet 2010.
Le plan Ecophyto a été adopté lors du Grenelle de l'environnement en 2008. Il vise à réduire de 50 % l'utilisation des pesticides d'ici à 2018. Plusieurs produits contenant des substances parmi les plus préoccupantes ont ainsi été retirés du marché français et l'usage de certains pesticides a été interdit dans les aires de jeux pour enfants et les cours de récréation. Par ailleurs, un Observatoire des résidus de pesticides (ORP) a été créé en 2005, en vue d'améliorer les connaissances sur les expositions de la population et des écosystèmes aux pesticides et de permettre l'évaluation des risques sanitaires.
Le Grenelle de l'environnement a également imposé aux professionnels, à échéance du 1er octobre 2014, de suivre une formation pour obtenir un certificat (Certiphyto) permettant d'acheter et d'utiliser des produits phytopharmaceutiques. De son côté, le Parlement français a adopté une proposition de loi en janvier 2014 interdisant les produits phytopharmaceutiques dans les espaces verts publics à partir de 2020, et dans les jardins particuliers à partir de 2022.
Par ailleurs, des règlements européens transposés en France fixent les limites maximales applicables aux résidus de pesticides dans les produits d'origine animale ou végétale destinés à la consommation humaine ou animale.
Les bilans des contrôles sont disponibles sur le portail internet du ministère de l'Economie, des Finances et de l'Industrie. En ce qui concerne l'eau potable, des limites de qualité sont fixées dans les eaux brutes et dans l'eau au robinet du consommateur.
Pesticides et jeunes enfants
L'exposition aux pesticides pendant la grossesse pourrait être à l'origine de leucémies et de tumeurs cérébrales chez l'enfant, suggèrent plusieurs études. Si les enfants peuvent ainsi être exposés avant même leur naissance, les nourrissons peuvent être en contact avec des résidus de pesticides qui se retrouvent dans le lait maternel.
Une ingestion non alimentaire par les poussières est également possible, surtout chez les enfants en bas âge qui jouent par terre et ont tendance à porter tout ce qu'ils trouvent à la bouche. C'est pourquoi une vigilance particulière est recommandée si vous êtes enceinte ou que vous allaitez, ou si vous avez de jeunes enfants.
Robert Barouki, professeur de biochimie à l'Université Paris Descartes, revient sur les facteurs de risque environnementaux.