Qu’est-ce qu’un cancer lié au travail ?

Certains cancers peuvent survenir à la suite d'expositions, en milieu de travail, à certains produits, agents ou procédés. Les cancers les plus fréquents affectent les voies respiratoires (cancers du poumon, mésothéliomes). La preuve d'un lien entre la maladie et l'activité professionnelle est souvent difficile à établir : relativement peu de cancers sont reconnus comme maladies professionnelles. L'exposition à des cancérigènes dans le cadre du travail peut être à l'origine de cancers.

Cancers d'origine professionnelle : une réalité difficile à évaluer

Certaines catégories de travailleurs sont exposées durant de longues périodes de temps à des concentrations élevées de produits « CMR » : cancérigènes, mutagènes et reprotoxiques (c'est-à-dire toxiques pour la reproduction). Une période de latence pouvant aller jusqu'à 50 ans peut s'écouler entre l'exposition à un ou des agents cancérigènes et la survenue d'un cancer. Santé publique France évalue la part des cancers d'origine professionnelle entre 4 et 8,5 % de l'ensemble des cas de cancers recensés chaque année en France, soit entre 16 000 et 34 000 cas. Les différences sont marquées d’un sexe à l’autre : les cancers d’origine professionnelle représentent 4 % des cas chez les hommes et 0,5 % chez les femmes.

Plus de 12 000 nouveaux cas de cancers par an seraient liés aux expositions professionnelles.

La diversité des expositions professionnelles et d'autres facteurs impliqués dans le développement des cancers (alimentation, tabac, environnement, prédispositions génétiques etc.) est telle qu'il est souvent très difficile d'établir la preuve du lien entre un cancer et l'activité professionnelle. D'autant que la maladie se déclare souvent des années après l'exposition, voire après l'arrêt de l'activité professionnelle. Dans de nombreux cas, relier un cancer à des causes professionnelles nécessite donc de retracer minutieusement l'historique des expositions vécues par le salarié.

 

Les cancers liés au travail : interview de Thierry Philip, directeur du département Cancer et environnement, Economie de la santé, Centre Léon Bérard (Lyon).

Des études ont permis d'identifier un certain nombre de facteurs professionnels susceptibles d'augmenter les risques ou de favoriser l'apparition de cancers. Elles distinguent notamment l'amiante, l'arsenic, le benzène, le chrome, le chlorure de vinyle, le nickel, les amines aromatiques, les hydrocarbures aromatiques polycycliques, les poussières de bois ou de cuir, ou encore les rayonnements ionisants. Parce que leur potentiel à provoquer des cancers ou à en augmenter la fréquence est prouvé, ces substances font partie des agents "CMR".

Quels sont les types de cancers les plus fréquents liés à des expositions en milieu professionnel ?

Les principaux types de cancers pour lesquels un lien a été établi avec des substances de l'environnement professionnel sont :

  • le cancer du poumon (amiante, arsenic et autres produits cancérigènes) ;
  • le mésothéliome ou cancer de la plèvre, cette membrane qui protège les poumons (dont la cause principale est l'amiante) ;
  • le cancer de la vessie (amines aromatiques, goudrons de houille, arsenic) ;
  • le cancer des cavités nasales (poussières de bois, nickel, chrome, arsenic) ;
  • des leucémies (benzène, rayonnements ionisants, certains pesticides).

Une sous-reconnaissance des cancers liés au travail

Certains cancers potentiellement imputables au travail peuvent faire, sous certaines conditions, l'objet d'une reconnaissance en maladie professionnelle et donner droit à une indemnisation du préjudice subi. Toutefois, ces pathologies demeurent largement sous-reconnues et donc, sous-indemnisées.

Seuls 15 % des cancers professionnels seraient reconnus comme tels. Ainsi, plus de 60 % des cancers du poumon possiblement liés au travail ne seraient pas répertoriés comme maladies professionnelles. C'est aussi le cas pour plus de huit leucémies d'origine professionnelle sur dix, et pour la très grande majorité des cancers de la vessie liés aux expositions professionnelles.

La difficulté de reconnaître ces cancers réside notamment dans le caractère multifactoriel de leurs causes (facteurs de risque professionnels et non professionnels) et dans l'absence de signes cliniques distinctifs par rapport à ceux qui ne sont pas liés au travail. De plus, c'est à la victime d'engager des démarches auprès de l'assurance-maladie en vue de faire reconnaître son cancer comme maladie professionnelle.

En 20 ans, le nombre de cancers reconnus d’origine professionnelle a triplé. En moyenne, l’assurance maladie reconnaît chaque année plus de 1 800 cancers professionnels. La France arrive, avec l’Allemagne, en tête des pays européens qui reconnaissent le plus de cancers professionnels en regard de leur population assurée.

En cas d’exposition, la surveillance et le suivi des travailleurs

Afin d'améliorer la prise en charge des cancers liés au travail, divers dispositifs d'évaluation et de traçabilité des expositions en milieu professionnel ont été développés : bases de données de mesures d'expositions, mise en œuvre du "dossier médical de santé au travail". Les travailleurs exposés à certains agents cancérigènes doivent ainsi bénéficier ainsi d'une surveillance médicale renforcée.

Par ailleurs, depuis 1995, un suivi post-professionnel a été mis en place pour les personnes retraitées ou en recherche d'emploi ayant été exposées à des cancérigènes durant leur activité professionnelle. Le médecin réalisera alors une surveillance adaptée, afin de dépister plus précocement la survenue d’une éventuelle maladie en lien avec l’exposition.

Pour en bénéficier, le travailleur doit transmettre à sa caisse d’assurance maladie l’attestation d’exposition remplie par son employeur ou le médecin du travail.

Pour en savoir plus, rendez-vous sur le site de l’assurance maladie


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