Soyez attentif à votre état nutritionnel

Le cancer, ses traitements et leurs effets indésirables peuvent avoir des conséquences sur votre alimentation, et plus particulièrement sur votre état nutritionnel, c’est-à-dire le bon équilibre entre ce que vous consommez et ce que vous dépensez physiquement.

Le rôle de la nutrition

Pour fonctionner, l’organisme a besoin d’énergie et de divers éléments nutritifs apportés par les aliments.

Le besoin en nutrition augmente avec la maladie et les traitements. Pourtant, les patients rencontrent souvent des difficultés physiques à s’alimenter. Cela peut aboutir à une perte de poids parfois importante et exposer à une dénutrition.

Dès qu’elle commence, la dénutrition a des conséquences importantes, notamment sur la qualité de vie et la poursuite des traitements.

À l’inverse, un surpoids ou l’obésité au moment du diagnostic, pendant ou après les traitements, peuvent aussi avoir des conséquences négatives sur la maladie.

En fonction des localisations de cancer, la dénutrition, comme la prise de poids, peuvent avoir des effets négatifs. Des recommandations existent pour ces différentes localisations.

Votre état nutritionnel est à surveiller

L’état nutritionnel doit être évalué et surveillé tout au long de votre parcours de soins.

Un accompagnement nutritionnel adapté permet de prévenir, dépister ou traiter le risque de dénutrition ou de surpoids et d’en limiter ainsi les conséquences sur votre état de santé.

Il est important de surveiller votre poids régulièrement (une fois par semaine). Si vous constatez un changement de poids de façon importante ou rapide, parlez-en au plus tôt aux professionnels qui vous entourent.

Un état nutritionnel adapté pour optimiser les traitements

Une nutrition appropriée fait partie intégrante de vos soins contre le cancer. Aussi, quel que soit votre état nutritionnel, vous pouvez bénéficier des conseils hygiéno-diététiques d’un professionnel en nutrition (diététicien ou médecin nutritionniste) afin d’adopter une alimentation adaptée. Si cette consultation ne vous est pas proposée, n’hésitez pas à en faire la demande auprès de l’équipe soignante qui vous suit.

Voici les repères de consommation à suivre si possible, sauf situation médicale ou avis médical requérant une adaptation particulière :

  • avoir une alimentation riche en céréales complètes, légumes secs, fruits et légumes ;
  • limiter la consommation d’aliments riches en matières grasses ou en sucres ;
  • limiter la consommation de viandes et charcuteries ;
  • limiter la consommation d’alcool ;
  • ne pas recourir aux compléments alimentaires en l’absence d’indication médicale.
Les recommandations nutritionnelles

Pour les patients en surcharge pondérale, il est conseillé d’attendre la fin des traitements pour revenir à un poids normal. Chez les personnes âgées de plus de 70 ans, cette perte de poids doit être évitée, pendant et après les traitements.

Pour les personnes à risque ou en état de dénutrition, vous pouvez consulter les conseils d’hygiène diététique permettant une alimentation par voie orale saine et orale.

Pendant les traitements, il est déconseillé de pratiquer le jeûne thérapeutique ou un régime restrictif. En effet, ils peuvent entraîner une perte de poids et de masse musculaire, et ainsi aggraver une dénutrition.

La dénutrition

Quand parle-t-on de dénutrition ?

La dénutrition est un état qui se caractérise par le manque de nutriments dans l’organisme. Une personne est considérée comme dénutrie en cas de perte de plus de 5 % de son poids habituel en 1 mois, ou de plus de 10 % en 6 mois. C’est par exemple le cas si une personne de 60 kilos perd 3 kilos en 1 mois ou 6 kilos en 6 mois.

Au-delà de 10 % en 1 mois ou de 15 % en 6 mois, on parle de dénutrition sévère. Cette dénutrition sévère peut survenir même si vous êtes en surpoids.

Pour dépister une dénutrition ou évaluer l’évolution de l’état nutritionnel, d’autres paramètres complémentaires, notamment biologiques (mesurés à partir de prises de sang), sont pris en compte.

Quelles sont les conséquences de la dénutrition ?

La dénutrition peut avoir des conséquences à court et à long terme.

À court terme, la dénutrition peut entraîner des risques de complications postopératoires, avec :

  • une diminution des défenses contre les infections, qui risquent d’être plus sérieuses et plus longues à guérir ;
  • une cicatrisation perturbée, plus longue, moins solide ;
  • l’apparition d’escarres (plaies de pression) ;
  • une fatigue générale et/ou une anxiété qui peuvent entraîner une prolongation de l’hospitalisation, un retour à domicile retardé et un risque de nouvelle hospitalisation.

La dénutrition peut également augmenter le risque d’effets indésirables liés à la chimiothérapie et/ou à la radiothérapie.

La dénutrition peut encore gêner le déroulement des traitements. Si le médecin juge que les risques de complications liées à la dénutrition sont trop importants pour poursuivre le traitement, il peut envisager de l’interrompre ou le reporter, voire y renoncer.

Si elle n’est pas traitée, la dénutrition peut aussi avoir des conséquences à long terme comme :

  • une fonte des muscles associée à une perte de force et à un risque de chutes ;
  • des difficultés à exercer les activités habituelles de la vie quotidienne ;
  • une fatigue importante et accentuée qui peut altérer la vie de tous les jours ;
  • un amaigrissement important qui modifie votre image corporelle et peut créer une gêne supplémentaire vis-à-vis de l’entourage ;
  • des difficultés dans la guérison de votre cancer.
Illustration de Pierre Bourcier - Les Conséquences de la dénutrition

Lutter contre la dénutrition

Des conseils d’hygiène diététique permettant une alimentation par voie orale saine et variée

Vous pouvez bénéficier de conseils hygiéno-diététiques pour une alimentation saine, diversifiée et adaptée. Ces conseils sont le plus souvent prodigués par un diététicien.

Si aucune consultation avec un professionnel en nutrition ne vous est proposée, n’hésitez pas à en faire la demande auprès de l’équipe soignante qui vous suit.

Quelques conseils pratiques peuvent être suivis au quotidien :

  • améliorez vos prises alimentaires orales journalières. Pour cela, n’hésitez pas à augmenter la fréquence des repas : faites au minimum 5 repas de petit volume répartis sur la journée, y compris en soirée ;
  • prenez le temps de manger et de bien mâcher les aliments. Cet effort prolongera la première phase de la digestion (la mastication) ; vous facilitez ainsi le passage des aliments mastiqués et mélangés à la salive (appelé le bol alimentaire) tout au long du tube digestif ;
  • adaptez la texture de vos aliments à vos capacités de mastication et de déglutition. Par exemple, en cas de dysphagie (difficulté à avaler) intermittente, irrégulière : privilégiez les aliments à texture molle voire liquide, bien saucés pour faciliter la déglutition. Évitez de consommer des repas trop chauds, trop sucrés ou trop acides ainsi que des aliments durs et secs (croûtes de pain, morceaux de viande peu mastiqués, fruits durs) ;
  • enrichissez les aliments et plats habituellement consommés. L’objectif est d’augmenter le nombre de calories sans augmenter le volume des portions ingérées. En pratique, n’hésitez pas à ajouter dans vos plats des matières grasses crues comme de l’huile d’olive, du beurre, de la crème, des crèmes de fromage. Sauf contre-indication médicale, les ajouts d’aliments sucrés intégrés aux repas sous forme de sucre, confitures, compotes, caramel, etc. sont aussi très utiles ;
  • maintenez des apports en protéines suffisants. Cela vous permettra de conserver vos muscles et vos défenses immunitaires. Mangez des aliments de type poissons, blancs d’œuf, fromages, laitages, surtout si vous présentez un dégoût pour la viande. N’hésitez pas à les hacher si vous avez des difficultés de mastication ou d’ingestion. Si cela ne vous convient pas, le médecin peut vous prescrire des compléments nutritionnels oraux ;
  • pensez à consommer au moins 1,5 litre de boissons comme de l’eau, du thé, du bouillon de légumes, des infusions, du café léger, réparti sur la journée. Évitez de boire pendant les repas ;
  • surveillez régulièrement votre poids : c'est un bon moyen de savoir si votre alimentation équilibre vos dépenses d'énergie. Si, malgré tous vos efforts, vous continuez à perdre du poids, consultez votre médecin ;
  • évitez le tabac, l’alcool ;
  • entretenez l'esprit convivial des repas et stimulez votre appétit, par exemple, en mangeant le plus souvent avec de la compagnie, en travaillant la présentation de vos plats et en vous installant à table dans un cadre agréable ;
  • après le repas, installez-vous en position semi-allongée pour faciliter la digestion et éviter les reflux alimentaires ;
  • reprenez progressivement ou maintenez si possible une activité physique quotidienne adaptée (par exemple une demi-heure de marche lente quotidienne).

Votre entourage ou des organismes spécialisés dans l'aide et l'accompagnement à domicile peuvent vous aider à faire vos courses et à préparer vos repas. Pour avoir recours à ce type de services, parlez-en avec une assistante sociale (dans l’établissement où vous êtes suivi ou en dehors).

Attention : au cours des traitements des cancers, la pratique du jeûne ou de régimes restrictifs entraîne un risque d’aggravation de la dénutrition et de perte musculaire. Cette pratique n’est donc pas conseillée.

Démarches sociales et cancer

Quelles autres solutions peuvent vous être proposées afin de lutter contre la dénutrition ?

Les compléments nutritionnels oraux

Vous avez enrichi votre alimentation mais elle ne parvient pas à couvrir vos besoins en nutriments, ou bien les aliments que vous consommez habituellement ne vous conviennent plus.

Votre médecin peut alors vous prescrire une forme spéciale d’aliments, semblable à un médicament, pour une période donnée : il s’agit de compléments nutritionnels oraux, également appelés complémentation orale.

Ces compléments contribuent à améliorer vos apports nutritionnels en quantité et en qualité. Ils sont nécessaires au rétablissement ou au maintien d’un état nutritionnel correct pendant vos traitements.

Comment se présentent les compléments nutritionnels oraux ou complémentation orale ?
Les compléments nutritionnels sont des aliments concentrés enrichis en éléments dont le corps a besoin pour fonctionner : calories, protéines, vitamines, sels minéraux, oligoéléments (ces éléments minéraux purs, comme le fluor, l’iode, le zinc… qui n’apportent pas d’énergie mais sont indispensables à certaines réactions chimiques dans l’organisme), etc.

Ils se présentent sous différentes formes (potages, biscuits, crèmes, boissons lactées ou à base de jus de fruits) et avec une variété de goûts et de saveurs (sucrés, salés). Votre médecin vous prescrira celles qui vous conviennent le mieux.

N’hésitez pas à demander également conseil à votre pharmacien et/ou au diététicien qui vous suit pour choisir les parfums et conditionnements adaptés à vos goûts, à vos préférences et à vos besoins nutritionnels.

Comment consommer les compléments nutritionnels oraux ?

Les compléments nutritionnels oraux viennent compléter votre alimentation habituelle, mais ne doivent en aucun cas remplacer les repas. Il est primordial de consommer ces compléments nutritionnels oraux en suivant les doses et la fréquence prescrites par votre médecin.

Ils sont remboursés intégralement par la Sécurité sociale pour traiter la dénutrition.

Ils sont disponibles en pharmacie, ou peuvent être livrés à domicile, suivant certaines conditions, par la pharmacie ou un prestataire de services.

Si la consommation de compléments nutritionnels ne vous convient pas, il est indispensable de le signaler à l’équipe médicale pour envisager une autre stratégie.


La nutrition entérale

L’équipe médicale peut vous proposer une technique de nutrition artificielle par sonde. C’est la nutrition entérale.

Quand utiliser la nutrition entérale ?

  • Vos apports nutritionnels restent insuffisants malgré une alimentation orale enrichie ;
  • l’alimentation orale est impossible ;
  • si vous devez recevoir certains traitements qui ont pour effet indésirable prévisible une grande difficulté ou une impossibilité à vous alimenter par la bouche, il arrive que la nutrition entérale soit mise en place en amont des traitements.

Votre médecin vous précise toutes les informations nécessaires. N’hésitez pas à poser toutes vos questions.

Comment fonctionne la nutrition entérale ?

Cette nutrition s’effectue généralement par une sonde de gastrostomie.

La sonde est introduite directement dans votre estomac par l’intermédiaire d’un orifice réalisé au niveau de l’abdomen.

Cette opération est effectuée dans un service de radiologie ou endoscopique. Vous serez sous anesthésie (locale ou générale selon les cas).

La gastrostomie a l’avantage d’être discrète pour votre entourage, tout en permettant de normaliser les apports nutritifs qui vous sont nécessaires.

La nutrition entérale peut aussi s’effectuer, pour une courte durée (moins d’un mois), par une sonde nasogastrique introduite par le nez pour atteindre l’estomac.

L’installation de la sonde nasogastrique provoque une gêne, malgré son diamètre suffisamment petit pour que vous ne la sentiez pas en permanence. La présence d’une sonde n’empêche pas la reprise de l’alimentation par la bouche.

La nutrition entérale possible à domicile

La nutrition entérale mise en œuvre par l’équipe soignante peut se poursuivre à votre domicile. Elle peut se faire de jour ou de nuit (à condition de dormir semi-assis dans le cas d’une sonde nasogastrique), selon votre préférence et la prescription faite par le médecin hospitalier.

Un prestataire de santé à domicile est sollicité pour fournir le matériel et les produits à administrer. Un infirmier à domicile assure les soins locaux et votre formation. Le but est de vous permettre d’être autonome pour gérer la nutrition entérale à la maison.

Cette forme d’alimentation peut durer plusieurs semaines, en particulier dans la phase suivant l’opération, mais aussi pendant toute la phase de chimiothérapie ou de radiothérapie. Elle permet le déroulement complet des traitements programmés. (Cette alimentation peut être maintenue, jusqu’à ce que les apports oraux soient suffisants pour couvrir vos besoins énergétiques. Cette évaluation se fera en fonction de la stabilisation du poids et selon les résultats du bilan biologique complémentaire.)

Comprendre la nutrition entérale


La nutrition parentérale

La nutrition parentérale est une autre forme de nutrition artificielle, par voie veineuse. Elle est utilisée en dernier recours, lorsque l’alimentation par voie orale et la nutrition entérale sont impossibles, insuffisantes ou contre-indiquées.

La nutrition parentérale possible à domicile

Après quelques jours de mise en œuvre à l’hôpital pour s’assurer de sa bonne tolérance, elle peut se poursuivre au domicile.

Le plus souvent, on utilise une chambre implantable ou un cathéter spécial (tube souple que l’on introduit dans les veines) placé au niveau du bras ou du cou.

L’installation du matériel est effectuée par un prestataire de santé à domicile. Il fait le lien avec l’infirmier libéral pour le passage de cette nutrition (le plus souvent en nocturne). Il se charge également d’informer l’équipe hospitalière sur le déroulement de cette nutrition.

Le pharmacien d’officine (pharmacien de ville) fournit, sur ordonnance, les poches de nutrition, les vitamines, les ions et oligoéléments associés pour constituer le mélange qui est perfusé.

Le service d’hospitalisation à domicile (HAD) peut également intervenir, avec réévaluation clinique et biologique régulière.

Cette technique demande une surveillance étroite. Elle est exercée à la fois par les infirmiers et infirmières au domicile et par le médecin prescripteur, et éventuellement par un médecin coordonnateur.

Comme pour la nutrition entérale, cette nutrition peut être transitoire (momentanée), totale ou partielle. Dans ce dernier cas, elle complète une alimentation orale insuffisante, en particulier pendant les traitements.