Les contraceptifs oraux

Les contraceptifs oraux, dits « pilules », sont prescrits en France depuis plus de 40 ans. Il s’agit du moyen de contraception le plus couramment utilisé pour éviter les grossesses non prévues en bloquant l’ovulation, et sont généralement bien tolérés par la plupart des femmes. 

Il en existe sous deux formes : les contraceptifs oraux contenant seulement une substance synthétique mimant l’action de la progestérone (pilules progestatives) et les contraceptifs hormonaux combinés (CHC), également appelés « pilules œstroprogestatives », qui combinent une substance mimant l’action de l’œstrogène et une autre mimant celle de la progestérone.

Des effets indésirables peuvent être associés à la prise de ce médicament, comme une légère hausse du risque de cancers du foie, du sein et du col de l’utérus. Pour ces deux derniers, le risque diminue au fil du temps après l‘arrêt. De plus, plusieurs études suggèrent que les femmes sous CHC risqueraient moins d’être atteintes d’un cancer de l’ovaire ou de l’endomètre.

En France, les CHC sont les traitements les plus couramment prescrits.

Leur formule a changé au cours des années : les CHC d’aujourd’hui, dits de la « troisième » ou de la « quatrième » génération, présentent des taux d’hormones plus faibles que ceux des générations précédentes, pour la même efficacité. Toutefois, les pilules de 3ème génération contenant du désogestrel ou du gestodène, et de 4ème génération contenant de la drospirénone, exposent à un risque accru d’accidents thromboemboliques par rapport aux générations précédentes et aux pilules de 3ème génération contenant du lévonorgestrel. Elles ne doivent donc pas être utilisées en première intention. Par ailleurs, celles qui étaient remboursées ne le sont plus depuis le 31 mars 2013.

Contraceptifs hormonaux combinés et cancers. 

En 1999, le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) a publié une première monographie relevant que la pilule œstroprogestative augmentait légèrement le risque de cancer du foie. En 2005, après un examen complet de la littérature scientifique, le CIRC a classé les CHC comme cancérogènes pour l’Homme (groupe 1), c’est-à-dire avec le niveau de preuve le plus important. Une nouvelle révision de cette expertise a été publiée en 2012.

Les experts estiment que la pilule contraceptive augmente le risque de cancer du sein, du col de l’utérus et du foie :

  • une femme prenant la pilule actuellement ou depuis peu semble accroître légèrement son risque de cancer du sein, en particulier les jeunes femmes et celles qui la prennent depuis 10 ans ou plus. Le risque revient à la normale 10 ans après avoir cessé de prendre des CHC ;
  • l’utilisation de CHC durant 5 ans ou plus fait augmenter le risque de cancer du col de l’utérus. Ce risque diminue au fil du temps, une fois ce traitement arrêté ;
  • l’utilisation à long terme de contraceptifs oraux fait légèrement augmenter le risque de carcinome hépatocellulaire chez les femmes dont le risque d’être atteintes d’une infection d’une hépatite B est faible. Le CIRC souligne ainsi que la pilule multipliait d’un facteur 2 à 3 le risque de cancer du foie. Dans la mesure où ce cancer est très peu fréquent (2 cas pour 100 000 femmes par an), ce cancer reste très rare parmi les femmes jeunes.

A contrario, les CHC auraient une action protectrice contre d’autres cancers. Ainsi, les femmes sous CHC risqueraient moins d’être atteintes d’un cancer de l’ovaire ou de l’endomètre, selon une étude parue dans The Lancet Oncology (2015). Cet effet protecteur est retrouvé même chez des femmes n’ayant pris la pilule que pendant quelques années et se prolonge au-delà de la cinquantaine, âge auquel le cancer de l’endomètre commence à se manifester.

Selon une grande étude épidémiologique américaine parue dans le JAMA Oncology, une contraception orale durant au moins 10 ans diminue le risque de cancer de l'ovaire de 40% par rapport à l'absence de contraception orale ou une utilisation de moins d'un an.

Certaines études laissent également entendre que la prise de CHC pourrait réduire le risque de cancer colorectal. Les résultats ne font cependant pas l’unanimité.

Les autres types de contraceptifs hormonaux comme le timbre, l’anneau vaginal, l’implant cutané et l’injection sont trop récents pour permettre d’en évaluer le risque de cancer avec assez de recul.

CHC et cancers du sein : un risque-dose dépendant ?

Une étude financée par le National Cancer Institute (NCI) américain en 2014 a montré des variations de risque selon les formulations des CHC. Elle a inclus 1 102 femmes âgées de 20 à 49 ans diagnostiquées pour un cancer du sein entre 1990 et 2009 et 21 952 contrôles appariés pour l'âge, l'année et la disponibilité des données médicales.

La prise récente d’une pilule œstroprogestative dans l'année précédente était associée à un risque accru de cancer du sein de 50 % par rapport aux femmes qui n'en avaient jamais pris ou aux anciennes utilisatrices. L'association était plus forte pour les cancers avec récepteurs aux œstrogènes (70 %) que pour les cancers sans récepteurs aux œstrogènes, sans que la différence soit statistiquement significative entre les deux groupes. Le surrisque était particulièrement important avec des contraceptifs fortement dosés en œstrogènes (multiplié par 2,7), avec le diacétate d'éthynodiol (multiplié par 2,6) ou avec un dosage triphasique comprenant en moyenne 0,75 mg de noréthindrone (multiplié par 3,1). En revanche, les autres types de pilules, comme celles faiblement dosées en œstrogènes, n'étaient pas associées à un surrisque.

Si ces résultats sont confirmés par de nouvelles études, la prise en compte d'un surrisque de cancer du sein associé à la formulation des pilules pourrait affecter la balance bénéfices/risques. Ces conclusions sont toutefois à prendre avec précaution : le cancer du sein reste rare chez les femmes jeunes et le surrisque de cancer du sein associé à la prise d’un contraceptif oral diminue après son arrêt. La HAS souligne par ailleurs que les cancers du sein liés à la pilule sont découverts à un stade plus précoce et qu’aucune différence n’a été observée en termes de mortalité.

Prescription : quelle pilule pour quelle patiente ?

Dans son document reprenant les bonnes pratiques de prescription des contraceptifs oraux (janvier 2015), la HAS indique que :

  • les progestatifs seuls (lévonorgestrel, désogestrel) présentent l’avantage d’avoir peu de contre-indications absolues et peuvent être utilisées durant l’allaitement. Parmi les contre-indications : un cancer du sein ou de l’utérus.
  • les pilules combinées (CHC) présentent plus de contre-indications, notamment en cas d’antécédent de tumeurs œstrogénodépendantes ou hépatiques. Elles sont contre-indiquées durant les trois premières semaines du post-partum et déconseillées durant l’allaitement.

Par ailleurs, en raison d’un surrisque d’accidents thromboemboliques, en particulier avec les CHC, il est recommandé de recueillir les antécédents détaillés de vos patientes (y compris tabagisme, migraines, antécédents médicaux…), ainsi que leur tension artérielle et leur indice de masse corporelle (IMC), et de vérifier ces deux derniers points au moins une fois par an.

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