Qu'est-ce qu'un essai clinique ?
Les essais cliniques ont pour but l'évaluation de nouveaux traitements du cancer ou de nouvelles modalités de soins. En effet, avant de proposer de nouveaux traitements à tous les patients concernés, il est impératif de prouver que ces nouveaux traitements sont efficaces et bien tolérés.
Parmi les essais cliniques, les "essais thérapeutiques" doivent notamment évaluer :
- de nouveaux médicaments ou associations de médicaments (contre la maladie ou ses effets secondaires), comparés dans certains cas aux traitements existants ;
- de nouvelles façons de les administrer (par comprimés plutôt que par injection, par exemple) ;
- de nouvelles techniques de traitement (nouveau type d'opération chirurgicale ou de radiothérapie, par exemple).
D’autres essais cliniques peuvent porter sur de nouvelles techniques de diagnostic (nouveau test biologique, par exemple) ou de prévention.
Les essais cliniques sont indispensables pour faire progresser et améliorer la prise en charge des cancers et, en conséquence, le parcours de soins des patients.
Quelles sont les différentes phases des essais cliniques ?
Avant les phases d'essais cliniques, la recherche préclinique
Quand un nouveau médicament est découvert, il est d'abord mis au point dans un laboratoire, puis testé sur l'animal.
Si les résultats de ces tests précliniques se révèlent favorables, il sera alors envisagé de proposer à des personnes malades de participer, avec leur accord, à son évaluation. Cette évaluation, réalisée avec la collaboration de patients, s'appelle un essai clinique.
Pour garantir la sécurité des malades et la rigueur scientifique, les essais cliniques comprennent plusieurs étapes (dites phases), qui sont chacune destinées à recueillir des informations spécifiques sur le nouveau traitement.
- Les essais de phase I ont pour objectif d'évaluer la tolérance de l’organisme et la toxicité d’un tout nouveau traitement (c’est-à-dire l’ensemble des effets indésirables liés à son administration). Le but est de déterminer la dose recommandée pour l’administration de ce nouveau traitement. Le traitement évalué est donné à un petit nombre de malades (10 à 40).
- Les essais de phase II précisent l’activité clinique ou pharmacologique d'un traitement à la dose recommandée à l’issue de la phase I. Ils nécessitent en général l'inclusion de 40 à 80 malades.
Les essais de phase I et de phase II permettent au patient d’avoir accès le plus tôt possible à des molécules innovantes issues de la recherche préclinique. Dans certains cas, un même essai clinique peut couvrir ces deux phases.
- Les essais de phase III sont des essais comparatifs. Ils permettent de comparer le nouveau traitement avec le traitement utilisé habituellement, dit "traitement de référence" ou "traitement standard", afin de déterminer son efficacité. Deux groupes de patients sont constitués par tirage au sort (randomisation), de manière à constituer des groupes homogènes et comparables (âge, sexe, caractéristiques de la maladie…) : l'un recevra le traitement de référence, l'autre le nouveau traitement. Dans certains cas, les patients ne sauront pas quel est le traitement reçu (traitement de référence ou nouveau traitement). On parle d’essai en aveugle. Il est dit "en double aveugle" lorsque ni le patient, ni le personnel soignant ne savent quel traitement est donné. Ce n'est donc pas le médecin qui décide de l'attribution de l'un ou l'autre des traitements à son patient.
Ces essais nécessitent l'inclusion d'un grand nombre de malades (plusieurs centaines ou milliers de malades) pour établir une différence entre les traitements.
Vers l’autorisation de mise sur le marché
Si les données et résultats de ces essais sont en faveur du nouveau traitement, cela permet de constituer un dossier d'enregistrement qui sera soumis aux autorités de santé afin qu'elles délivrent une autorisation de mise sur le marché (AMM). Celle-ci rend possible la commercialisation du nouveau traitement.
- Les essais de phase IV interviennent après l’autorisation de mise sur le marché. Quand le médicament est commercialisé, il fait encore l'objet d'une surveillance étroite appelée pharmacovigilance. L’objectif peut être d’identifier tout effet secondaire grave, rare, exceptionnel et/ou inattendu dû à l’administration du médicament. Il peut s’agir également de préciser les conditions d’utilisation de ce médicament sur certains groupes de patients.
Tout signe anormal inattendu dû à l'administration d'un médicament peut être déclaré par les patients ou les associations à l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM).
À savoir : le malade ne participe pas à toutes les phases de manière successive mais se voit proposer de participer à un essai dans l'une des quatre phases, en fonction de critères d’inclusion (et d’exclusion) très précis.
Traitement de référence = traitement standard
Traitement expérimental = nouveau traitement à l’étude
Qui est à l'initiative d'un essai clinique ?
On appelle "promoteur" de la recherche l'institution qui propose de mettre en œuvre un essai et qui assure son financement. Il peut s'agir d’un hôpital ou groupement hospitalier, d’une institution de recherche privée ou publique, d’une association ou d’un laboratoire pharmaceutique. Le promoteur met en place la surveillance de l’essai à travers un comité de pilotage chargé d’écrire le protocole de recherche, de s’assurer que les traitements prévus sont conformes à la question posée et de suivre le bon déroulement de l’essai, de la conception à la publication des résultats, en respectant les "bonnes pratiques cliniques" (BPC).
Un essai clinique peut être mis en place simultanément par plusieurs équipes sur le territoire français. Il peut également être mené au niveau européen, voire international.
Qui peut autoriser les essais cliniques ?
Les essais cliniques sont soumis à des autorisations différentes en fonction du niveau de risque encouru. Il existe à ce jour trois catégories de recherche impliquant la personne humaine (RIPH).
Catégorie | Type de recherche | Lancement de l’essai soumis à : | Consentement du patient |
---|---|---|---|
Catégorie 1 | Les recherches à risque : recherches portant sur des médicaments, sur d’autres produits de santé comme les contraceptifs, les dispositifs médicaux, les produits biologiques (produits sanguins, préparation de thérapie cellulaire...) | Avis favorable du Comité de protection des personnes et autorisation de l’Agence nationale pour la sécurité du médicament et des produits de santé | Information et consentement écrit libre et éclairé |
Catégorie 2 | Les recherches à risque et contraintes minimes : elles portent sur des produits de santé (hormis les médicaments) dans les conditions habituelles d’utilisation ou sur des actes peu invasifs (prélèvement veineux sanguin, imagerie non invasive…) | Avis du Comité de protection des personnes | Information et consentement exprès (écrit ou oral) libre et éclairé (dérogation en situation d’urgence) |
Catégorie 3 | Les recherches non interventionnelles (les recherches qui ne comportent aucun risque ni contrainte, dans lesquelles tous les actes sont pratiqués et les produits utilisés de manière habituelle) | Avis du Comité de protection des personnes | Information et déclaration de non-opposition libre et éclairée |
Quels sont les organismes de contrôle ?
Le Comité de protection des personnes (CPP) est indépendant ; il est chargé de vérifier que l’essai clinique proposé est acceptable sur le plan scientifique et éthique, en veillant tout particulièrement à la protection des personnes et à la qualité de leur information. Chaque comité comporte des personnes qualifiées en matière de recherche clinique, des professionnels de la santé, des juristes, des psychologues, des personnes compétentes en éthique et en épidémiologie et des représentants des associations agréées de malades et d’usagers du système de santé.
L’Agence nationale pour la sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) évalue la sécurité et la qualité des produits utilisés au cours de la recherche, avec l’objectif de s’assurer que la sécurité des personnes se prêtant à la recherche clinique est garantie. Si ces conditions ne sont pas présentes, elle peut s’opposer à un essai.
Qui mène l'essai clinique ?
Un essai clinique est mené dans un centre investigateur (généralement dans un service d’un établissement de santé) et le plus souvent conduit par un médecin qu’on appelle investigateur de l’essai. C'est lui qui propose au patient de participer à l'essai, lui fournit toutes les explications nécessaires et le suit pendant toute la durée de l'essai.
Qui prend soin du malade ?
Dans un essai clinique, le malade est entouré d'une équipe qui prend soin de lui, disponible pour l'informer, l'écouter, répondre à ses questions et à ses attentes : l'investigateur de l'essai, l'infirmier, l'attaché de recherche clinique, ou ARC (qui aide le médecin investigateur à l'inclusion et au suivi des malades), un psychologue si le malade en exprime le besoin, et le médecin traitant, tenu régulièrement informé de l’avancement et des résultats de l'essai.
Tous les malades sont-ils concernés ?
Les patients qui pourront entrer dans un essai clinique doivent remplir un certain nombre de critères, appelés critères d'inclusion ou critères d’éligibilité. Les critères d'inclusion sont propres à chaque essai clinique.
Chaque essai a un objectif précis ; c'est pourquoi certains malades, et pas d'autres, se verront proposer de participer à un essai, en raison de certaines de leurs caractéristiques, par exemple le type ou la taille de leur tumeur.
Le fait d’être inclus ou non dans un essai clinique ne préjuge en rien du pronostic de la maladie ou du succès du traitement utilisé.
Participer à un essai clinique est-il utile pour faire progresser la recherche ?
La participation des malades à des essais cliniques est une contribution indispensable à la découverte de nouveaux traitements et de nouvelles stratégies qui pourront bénéficier à un grand nombre de personnes touchées par le cancer.
Les progrès réalisés en médecine, notamment dans les traitements contre le cancer, sont le fruit de la recherche clinique, grâce à des essais menés avec rigueur et méthode, garants d'un bon niveau de preuve scientifique. Cependant, il reste encore de nombreuses situations qui démontrent l'incertitude et l'insuffisance des thérapeutiques actuelles. De nombreux progrès restent à accomplir, tant dans la recherche de nouveaux traitements que dans l'élaboration de nouvelles stratégies thérapeutiques.
Il faut aussi noter que grâce à la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé (dite loi Kouchner), les personnes qui ont participé à une recherche dans le cadre d'un essai clinique peuvent demander à être informées, à l'issue de cette recherche, de ses résultats globaux.
Le patient est-il libre de participer à l'essai clinique qu’on lui propose et peut-il changer d'avis, même après avoir accepté ?
La participation du patient est libre et volontaire. Même après avoir accepté de participer à un essai, il est libre de le quitter à tout moment. Son médecin lui proposera alors un autre traitement adapté à sa maladie. Cette décision ne changera rien à l'engagement de l'équipe médicale pour traiter sa maladie.
Deux documents obligatoires pour l'information et le consentement du patient :
- la notice d'information ;
- le formulaire de consentement éclairé.
Par quelles modalités le patient est-il informé de manière à pouvoir prendre sa décision en toute liberté ?
Avant toute participation à un essai clinique, le médecin délivre au patient une information orale puis il lui remet obligatoirement une note d'information écrite qui liste les bénéfices attendus et les risques potentiels. Cette notice peut parfois paraître compliquée à comprendre. Le patient pourra demander des explications sur tout ce qui ne lui paraît pas clair.
Le patient pourra ainsi avoir connaissance de toutes les informations nécessaires pour comprendre l'essai et réfléchir aux raisons qu’il pourrait avoir d'y participer, en prenant le temps de la réflexion nécessaire à sa décision. Il sera également informé des alternatives possibles s’il ne souhaite pas participer à l'essai.
Seuls les patients qui y consentent ou ne s’y opposent pas (en fonction du type d’essai clinique), après avoir reçu toutes les informations nécessaires pour comprendre l'essai clinique, peuvent y participer. Il est donc impossible d'être inclus dans un essai sans le savoir.
Pour les essais thérapeutiques de médicaments ou sur les dispositifs médicaux risqués, le consentement libre, écrit et éclairé du patient sera recueilli dans un formulaire de consentement transmis par son médecin. Ce formulaire concrétisera son accord et attestera qu’il a bien reçu les informations concernant l'étude. Il sera signé par le patient lui-même et par le médecin.
Que contient la notice d’information ?
• les objectifs, la méthodologie et la durée de l’essai clinique ;
• les bénéfices et effets secondaires attendus ;
• les contraintes liées au nombre de consultations, aux examens à réaliser et qui pourraient impacter le rythme de vie quotidien ;
• les alternatives médicales si le patient ne souhaite pas entrer dans l’essai ou s’il ne peut pas y participer ;
• la possibilité de retirer son consentement à tout moment, sans préjudice.
En participant à un essai clinique, le patient a-t-il plus de chances d'avoir le meilleur traitement ?
Participer à un essai clinique ne représente aucune perte de chance par rapport au traitement administré en dehors d'un essai clinique. Mais, cette participation offre la possibilité d'avoir accès, dans certains cas, aux traitements les plus innovants. La participation du patient à un essai a pour objectif de déterminer quel sera le meilleur traitement de demain.
Néanmoins, s’il refuse de participer à l'essai clinique qui lui est proposé, cette décision sera sans conséquence sur la prise en charge de sa maladie, sur ses relations avec son médecin et l'équipe soignante, et sur la qualité des soins qui lui sont prodigués.
Y a-t-il des risques particuliers à participer à un essai clinique ?
Tout traitement, qu’il soit réalisé dans le cadre d’un essai clinique ou non, présente des risques.
Ceux-ci sont le plus souvent connus et répertoriés, mais il peut arriver que certains symptômes, particulièrement rares, n'aient pas encore été signalés, même si des études approfondies ont déjà été effectuées en laboratoire avant que ces essais ne soient menés sur l'homme.
Aussi, des contrôles et des examens supplémentaires pour rechercher des effets indésirables inattendus peuvent être nécessaires et ajouter des contraintes pour le malade. Toutes les modalités de prise en charge et de suivi d'un patient qui entre dans un essai clinique sont définies avec précision et soumises à diverses réglementations (nationales et internationales) et à des organismes de contrôle très rigoureux. Le médecin investigateur lui présente l’essai ainsi que les bénéfices attendus globalement, mais aussi les risques potentiels (notamment les effets indésirables connus) du nouveau traitement ou liés à la participation à l’essai. Il présente aussi les bénéfices et les risques potentiels des alternatives thérapeutiques.
Pendant l’essai, une surveillance étroite est mise en place par le médecin et l’équipe soignante en lien avec le promoteur de l’essai et les autorités de santé. Le patient peut poser toutes les questions qui le préoccupent aux membres de l’équipe qui l’accompagne. L'équipe médicale continuera, tout au long de l'étude, à lui fournir toutes les explications utiles sur la nature et le déroulement du traitement.
La loi garante de la sécurité des patients
En France, tout participant à un essai clinique est protégé par la loi relative à la protection des personnes qui se prêtent à une recherche biomédicale, dite loi Huriet-Serusclat de 1988, modifiée par la loi de santé publique du 9 août 2004. La loi s’attache en particulier à préserver les droits et intérêts des patients.
Cet arsenal est complété par le décret d’application de la loi Jardé du 16 novembre 2016 relatif aux recherches impliquant la personne humaine.
Quels bénéfices le patient a-t-il à participer à un essai clinique ?
Participer à un essai clinique, c'est la possibilité d'avoir accès à un traitement innovant.
C'est aussi un encadrement spécifique de la prise en charge et un suivi adapté et rigoureux, pendant et après la fin du traitement.
Les médecins qui effectuent un essai clinique suivent scrupuleusement un plan de traitement (plan thérapeutique). Ce plan définit toutes les modalités de l'essai (critères d'inclusion, durée, calendrier du traitement, examens complémentaires…). Le plan thérapeutique prévoit également une surveillance du patient tout au long du déroulement de l'essai, afin de vérifier l'efficacité et la tolérance du traitement. En conséquence, tous les médecins et infirmiers qui collaborent à un essai clinique suivent en permanence le malade, afin de vérifier que le traitement produit les bénéfices escomptés et d'intervenir immédiatement si le moindre effet secondaire apparaît.
S'agissant de nouveaux traitements, les personnes malades incluses dans des études cliniques sont suivies avec une grande rigueur pendant toute la durée de l'essai clinique, mais aussi après la fin du traitement.
Le patient est-il rémunéré pour participer à un essai ?
La participation à un essai clinique ne donne lieu à aucune rémunération. Cela permet de garantir le libre choix de consentir à l’essai en accord avec les dispositions de l’article L.1121-11 du code de la santé publique, comme le prévoit la législation.
Quelques contraintes possibles
Le déroulement d’un essai peut être contraignant dans la mesure où le patient doit organiser son quotidien autour des exigences du protocole de recherche auquel il participe. Participer à un essai peut donc avoir des conséquences sur son rythme de vie et impliquer des adaptations dans sa vie personnelle et professionnelle. Il est cependant essentiel de respecter le planning des examens et de traitement prévu dans le protocole.
Il est important pour le patient de mesurer l’impact et l’organisation de l’essai sur sa vie quotidienne avant de prendre sa décision.
Participer à un essai clinique en cancérologie
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